Concurrence & Marché

Gigaliners : la Suisse sur la voie de la confrontation avec l'UE ?

| Mis à jour le 24.04.2024 | de Niels Volken

La semaine dernière, le Parlement européen a ouvert la voie au transport transfrontalier de gigaliners. La pression de l'UE sur la Suisse pourrait ainsi augmenter. L'ASTAG s'oppose catégoriquement aux gigaliners sur les routes suisses.

Ils sont déjà très répandus en Scandinavie - les "gigaliners", c'est-à-dire des camions de 25,25 mètres de longeur et d'un poids total allant jusqu'à 60 tonnes. A l'avenir, ils circuleront dans toute l'Europe. C'est du moins ce que souhaite le Parlement européen. La semaine dernière, il a adopté une directive modifiée sur l'harmonisation des masses et des poids des véhicules utilitaires, permettant la circulation transfrontalière des gigaliners.

Mais il faudra encore attendre avant que les gigaliners puissent circuler librement. Le projet doit encore être approuvé par les ministres des transports de l'UE. Ceux-ci n'ont pas été unanimes lors de leur dernière réunion, l'Autriche en particulier s'oppose fermement aux gigaliners. Le Brenner n'est pas conçue pour de telles dimensions et de tels tonnages, les ponts et les tunnels sont déjà à bout de souffle, met en garde Vienne. De plus, les élections européennes auront lieu dans trois mois, tandis que le renouvellement de la Commission et la définition des objectifs de la législature auront lieu à l'automne. Dans ce contexte, il est douteux que la directive soit adoptée cette année encore. Une fois qu'elle le sera, les États membres bénéficieront finalement d'une période de transition de deux ans pour intégrer les nouveaux  en carburant dans leur législation nationale.

Contrairement aux règlements européens immédiatement contraignants, les directives laissent aux États membres une grande marge de manœuvre en termes de mise en œuvre. C'est également le cas ici. La directive sur les gigaliners prescrit certes un poids et des dimensions maximaux, mais elle laisse les États membres libres de décider s'ils veulent les exploiter au maximum. Il en va de même pour le trafic transfrontalier : seuls les pays de l'UE qui autorisent eux-mêmes les gigaliners doivent également ouvrir leurs routes à ceux d'origine étrangère.

 

L'ASTAG contre les gigaliners sur les routes suisses

Avec l'Accord sur les transports terrestres, la Suisse s'est engagée à intégrer certaines normes de l'UE dans ses propres lois. Parmi ces normes figure cette même directive fixant les tailles et poids des camions. En principe, la Suisse serait donc libre d'augmenter ou non les limites des poids des camions. Il faut néanmoins s'attendre à des pressions de la part de l'UE pour que les gigaliners soient admis sur l'important axe nord-sud. Jusqu'à présent, ce sujet n'est pas à l'ordre du jour des négociations entre la Suisse et l'UE sur les futures relations bilatérales. Le Conseil fédéral a en outre assuré que les piliers de la politique des transports dans l'Accord sur les transports terrestres ne seraient pas modifiés.

L'ASTAG s'oppose catégoriquement à l'admission de gigaliners en Suisse et a déjà publié une prise de position sur le sujet en octobre dernier. Les conditions géographiques de la Suisse ne sont pas adaptées aux gigaliners et le réseau routier n'est pas conçu pour les accueillir. Par conséquent, il faudrait procéder à des adaptations coûteuses des ponts, des tunnels et des bretelles d'accès. Les moyens pour ces adaptations de l'infrastructure manquerait à nouveau ailleurs. D'autres modernisations et extensions urgentes du réseau des routes nationales devraient être reportées au profit des gigaliners.

Les gains d'efficacité des gigaliners ne peuvent être réalisés que sur des trajets plus longs. Dans le Liant, avec des distances plus courtes, leur utilisation n'est guère rentable. D'une Admission profiterait donc principalement le Trafic de transit. Or, selon la Constitution, ce dernier doit être acheminé par le Rail.